Une autre vision du basket et du CSP Limoges


PASCAL JULLIEN: DU PLAISIR, DU TRAVAIL ET DE LA FOLIE

01/02/2013 11:55

 

 

 

Oh bien sûr, ce n'est pas la plus grande star croisée à Limoges. Mais pour moi, Pascal Jullien c'est une image: un shoot à trois points pris un mètre derrière la ligne contre le Jugoplastika Split et qui met le feu à Beaublanc et entame la révolte. En face? Presque rien: Kukoc, Radja, Tabak et sur le banc un certain Maljkovic.

Après avoir fini meilleur marqueur de Pro B à Berck (avec 46% à trois points), ce meneur a rejoint Limoges où il a passé quatre saisons (de 1988 à 1992), où il fût un excellent joueur de complément. A l'arrivée, deux titres de champion (88/89 et 89/90), une troisième place au Final Four en 89/90 et un Tournoi des As (89/90).

Je lui ai expliqué en quoi consistait notre site, et il a accepté de répondre à quelques questions au nom "de la grande famille du basket". Et puis, il s'excuse pour le retard de son appel car il venait de passer voir Eric (NB: Girard) qui se bat contre une saloperie de cancer (les membres du site s'associent à moi pour lui envoyer tous nos voeux de courage).

Au final, l'impression d'avoir discuté avec un mec bien.

 

KD:- Comme on est dans la période des voeux (NB:discussion en date du 10 janvier), je te présente les miens et ceux du 5ème Quart temps.

Pascal Jullien (PJ):-Je te remercie, et je te les présente à mon tour.

KD:- Que deviens-tu?

PJ:- Je gère une entreprise de menuiserie et de vérandas d'une quinzaine de personnes dans la région du Portel. A la fin de ma carrière pro, je suis resté un an et demi au chômage. Puis j'ai racheté des parts dans une entreprise et je l'ai amenée au niveau qu'elle a à l'heure actuelle. Parallèlement, je suis manager au Portel (en Pro B), mais malheureusement, je ne peux pas l'être à plein temps. Je vais voir comment vont tourner les choses, et j'aimerai m'investir un peu plus dans le club. Mais les journées ne font que 24heures, et j'ai aussi une vie de famille.

KD:- Et une femme conciliante? (rire)

PJ:- Oui, mais je sais que j'abuse.

KD:- Les clubs de basket ne préparent pas à l'après vie pro?

PJ:- Pour moi, ce n'est pas vraiment le rôle du club de te préparer à ça, mais plutôt celui de l'agent. Mais je t'avoue que quand tu as deux matchs par semaine, tu n'as pas vraiment le temps de te préparer à l'après.

KD:- Meilleur marqueur à Berck, tu débarques à Limoges. D'autres clubs t'avaient-ils approché?

PJ:- Limoges m'avait appelé, et ça me faisait "bander". Jean Galle (du Nord lui aussi), à Cholet, m'avait à l'oeil. Je vais te raconter une anecdote marrante. J'étais en partance pour une visite à Cholet. Mon téléphone sonne et Jean-Claude Biojout (NB: l'autre tête du binôme Popelier/Biojout) me dit de venir à Limoges pour signer. Je lui dis que je vais à Cholet, et comme il me demande si ils me proposent une signature, je lui réponds que non. Du coup, ça a été Limoges.

KD:- C'était une autre période. Je t'avoue que même si je suis content des titres gagnés par la suite, je garde de cette période un souvenir exceptionnel.

PJ:- Pour tout, c'était une autre période. En partant de Berck, j'ai perdu mon job de gardien de la salle. Et puis pour mon déménagement, je l'ai fait tout seul.

KD:- Je garde de toi un des plus beaux souvenirs de spectateur à Beaublanc: un shoot extraordinaire à trois points face au grand Split de Kukoc et Radja. Je suppose que tu t'en rappelles.

PJ:- Et Ivanovic, et sur le banc Maljkovic. Oui, c'est un de mes meilleurs souvenirs, mais il y en a plein d'autres. Tu vois, mon rêve fou ce serait de faire toucher un peu de ça au Portel. J'agis beaucoup par coups de folie. Partir de Berck et laisser tomber un boulot pour une carrière Pro, c'était de la folie. Mais il y a des conséquences. C'est dur de vivre loin de ses enfants (NB: Pascal a une fille). C'est aussi pour ça que je suis allé voir Eric. IL est loin de ses proches et avec la maladie, c'est très dur.

KD:- Tu fonctionnes à l'affectif? As-tu gardé des liens avec des coéquipiers de l'époque?

PJ:- Avec pas mal d'entre eux. Les relations pouvaient paraître superficielles, mais à la fin, quand on se quitte, on garde des liens. J'ai des contacts avec Ken (NB: pas moi, le vrai), Richard (NB: je ne le présente pas), Michael (NB: Brooks), Stéphane (NB: Ostrowski) ou Jimmy (NB: Vérove).

KD:- On peut dire que ça avait de la gueule en attaque: Don, Michael... Avec eux tu peux voyager.

PJ:- Des Pharaons ces mecs.

KD:- Suis-tu la Pro A? Avec Ken, on était assez d'accord pour dire qu'elle est assez triste.

PJ:- Je te suis. Elle est triste. Mais en même temps je ne peux la juger que sur les matchs que je vois. Je n'en vois que un ou deux sur les dix de chaque journée.

KD:- Quand on regarde le classement, les leaders ont déjà quatre défaites et puis les aventures européennes de clubs français sont très courtes.

PJ:- Oui, et ça c'est dramatique. C'est pour ça que dans ma folie j'aimerai faire connaître ça au Portel.

KD:- En même temps, la ProA est jouable. Des clubs avec des petites structures sont montés les autres années.

PJ:- Je ne sais pas, je n'ai pas assez de recul. Il faudrait que je m'y investisse à plein temps pour être plus lucide sur ça. Mais on a les structures pour, et financièrement, beaucoup de club aimerait avoir notre solidité, même si on a un petit budget.

 

KD:- Tu as eu de beaux coachs à ton tableau de chasse. Tu n'as jamais été tenté?

PJ:- Le cours des choses n'a pas été ainsi. Je ne me sentais pas assez meneur d'hommes.

KD:- Belle ironie, vu ton poste.

PJ:- Oui, mais ce n'est pas parce que tu mènes le jeu que tu peux mener les hommes. J'ai coaché le Portel en  N4 et N3. J'ai même fait entraîneur joueur. Mais c'est tombé au moment où j'ai débuté ma nouvelle vie professionnelle. Mais maintenant, je me rends compte que j'ai quinze gars sous mes ordres. J'ai peut-être raté quelque chose.

KD:- Une dernière petite question, que j'ai déjà posé à Ken.

PJ:- Vas-y.

KD:- Ton 5 majeur de rêve?

PJ:- C'est dur. Jordan et Magic c'est évident. Surtout que Magic, c'est particulier pour moi, je lui ai serré la main, j'ai joué contre lui (NB: au tournoi Mac Donald à Bercy, le CSP avait rencontré les Lakers). Julius Erving est aussi un joueur très emblématique. Mais c'est trop réducteur. Tous les mecs avec qui j'ai pris du plaisir à jouer devraient être dans mon équipe de rêve. Le plaisir c'est tellement important.

KD:- Merci Pascal, et à bientôt j'espère.

PJ:- Aucun problème.

 

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